D’après une étude publiée dans la revue The Cell, le coronavirus aurait subi une mutation le rendant plus contagieux mais moins virulent. Une thèse réfutée par les médecins.
Le débat fait rage ces derniers jours : le Covid-19 serait devenu plus transmissible mais moins dangereux qu’au début de la pandémie. En témoignent l’augmentation du nombre de cas détectés, soit 5 000 nouveaux cas hier en France, et la stagnation du nombre d’hospitalisations. A l’origine de la thèse, des travaux effectués par un groupe de chercheurs britannico-américains et parus dans la revue scientifique The Cell le 2 juillet dernier. Le relais fait Les Echos en fin de semaine dernière a nourri le débat sur les réseaux sociaux et alimenté les théories des anti-masques.
Cette supposée évolution du virus serait due à une mutation, un changement au niveau de son génome. Des chercheurs des universités de Sheffield (Royaume-Uni), de Duke et du laboratoire national de Los Alamos (Etats-Unis) ont travaillé sur la base de données Gisaid qui regroupe plus de 80 000 séquences du virus, et analysé les données de 999 patients britanniques atteints du coronavirus. D’après leurs résultats, la mutation « D614G » aurait modifié la structure de la Protéine S, une molécule permettant au virus de se fixer sur les cellules humaines. Par contre, cette forme du virus provoquerait une charge virale supérieure, laissant à penser qu’elle pourrait être plus contagieuse car elle infecterait plus rapidement les personnes contaminées. Toutefois, les scientifiques ne constatent pas de symptômes plus sévères.
Les chercheurs restent très prudents sur leurs observations, et préviennent qu’il faudra d’autres études pour les confirmer. Selon eux, cette mutation existerait depuis plusieurs mois. Observée dans 10% des séquences génétiques du virus en mars, on la retrouvait dans près de 80% le mois suivant. Ainsi, l’Europe et les Etats-Unis n’auraient connu quasiment que cette souche, qui serait donc en grande partie responsable des ravages de la pandémie.
Le virus n’est pas moins virulent d’après les médecins
La thèse d’un virus moins dangereux ne fait pas unanimité, loin de là. Sur BFMTV, le professeur Arnaud Fontanet rappelle le propos exact de l’étude, c’est-à-dire que le virus « est le même depuis mars » et que « la situation n’a pas changé en France ». Selon lui, l’article des Echos a été mal interprété. « L’histoire d’un virus qui serait moins transmissible ou moins grave est une histoire totalement construite, on n’en sait rien pour l’instant », affirme de son côté Karine Lacombe, cheffe du service maladies infectieuses à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, sur France Inter.
Le virus ne serait donc pas moins dangereux qu’avant. Mais alors comment expliquer que l’augmentation du nombre de cas n’est pas suivie d’une augmentation des hospitalisations ? « La courbe épidémique, si elle est moins violente actuellement, c’est d’abord parce que l’on est en été et que le coronavirus a une base saisonnière – on risque d’ailleurs d’y retourner quand on sera de nouveau en hiver », suppose Olivier Bouchaud, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Avicenne de Bobigny, sur France Inter. Et de conclure que « c’est surtout que le virus atteint les jeunes parce qu’ils se protègent moins et qu’ils sont souvent asymptomatiques ».