Des députés dissidents de La République En Marche pourraient créer un neuvième groupe parlementaire. Le groupe présidentiel ne serait plus majoritaire à l’Assemblée nationale.
La nouvelle pourrait avoir l’effet d’une bombe en vue de la seconde partie du quinquennat d’Emmanuel Macron. Une cinquantaine de députés, dont une vingtaine de « marcheurs », souhaite s’inscrire dans un nouveau groupe parlementaire nommé « Ecologie, Démocratie, Solidarité ». D’après le journal Les Echos, le neuvième groupe à l’Assemblée nationale devrait être lancé la semaine prochaine et opérationnel le 1er juin.
De « marcheurs » à « frondeurs »
Ils sont 58 en tout. Ils viennent du PS, de EELV, ou encore du clan du mathématicien exclu Cédric Villani, mais surtout du groupe La République En Marche, le mouvement du chef de l’Etat. L’initiative pourrait s’articuler autour de Matthieu Orphelin, ancien député « marcheur » et proche de Nicolas Hulot.
Le futur groupe assure, dans un manifeste provisoire, vouloir « faire plus et mieux à l’Assemblée nationale pour répondre à l’urgence écologique, moderniser la démocratie, réduire les inégalités sociales et territoriales ». Il ajoute que « après le Covid-19, plus rien ne doit être comme avant ». En effet, les dissidents considèrent que la crise sanitaire a fait ressortir « les failles et les limites de notre modèle de développement ». Ils souhaitent profiter de la situation pour « retrouver d’urgence le sens de l’essentiel : notre souveraineté alimentaire, notre besoin de sécurité sanitaire, notre production locale pour des emplois de proximité, relever les défis du changement climatique, réinventer le lien social… ». Une démarche qui a pour socles la consultation citoyenne Le Jour d’Après et les propositions de la Convention citoyenne pour le climat.
Au-delà des divergences politiques, les députés se lassent du fonctionnement verrouillé de la majorité présidentielle. Depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron, l’opposition qualifie régulièrement les députés de « godillots » et l’Assemblée nationale de « chambre d’enregistrement des désirs de l’Élysée », tant la majorité obéit au gouvernement. Derrière la scission, il y a surtout la volonté chez les dissidents de « faire entendre notre voix ».
LREM perd sa majorité absolue
Plus qu’un chamboulement politique, c’est un coup de tonnerre pour La République en Marche. En effet, le départ annoncé de la trentaine de députés mettrait un terme à la majorité absolue du parti présidentiel. Dans son manifeste, le futur groupe se déclare « ni dans la majorité, ni dans l’opposition » mais se dit « prête à construire avec le gouvernement et la majorité chaque fois qu’ils seront à l’écoute de nos propositions, comme avec tous les bancs politiques, pour construire une majorité d’idée ». En d’autres termes, il sera du côté de la majorité quand ça ira dans son sens, et dans l’opposition en cas de désaccord. Toutefois, le vote des lois ne devraient pas être remis en cause, car les « marcheurs » s’appuieront sur le groupe MoDem, allié historique de la majorité. Mais ce revirement serait synonyme de crise politique majeure au sein de LREM à deux ans de l’élection présidentielle.
De son côté, le président du groupe majoritaire, Gilles Legendre, invite les dissidents à la « plus grande prudence », et estime que l’initiative « constituerait une double rupture de confiance », vis-à-vis à la fois du chef de l’Etat et des électeurs. Les macronistes gardent certainement en mémoire l’épisode des « frondeurs » socialistes qui avait miné le mandat de François Hollande. Il pourrait en être de même Emmanuel Macron.